Les clés pour bâtir et entretenir sa e-réputation
Le 22 juin, la Fnim a planché sur la e-réputation. Qu’est-ce que c’est ? Comment s’en bâtir une ? Comment la gérer ? La dynamiser ? Des éléments de réponses ont été apportés par Alain Clergeot, patron de Chugai Pharma, et Camille Saint-Paul, créatrice de l’agence 5e Rue, tous deux invités du petit-déjeuner débat mensuel de la Fnim, à l’Aéro-Club de France, à Paris.
Aujourd’hui, l’image d’une entreprise, quel que soit son secteur d’activité, passe par les canaux classiques de la publicité, de la communication ou autres événementiels, mais aussi par le Web. En effet, espérer bâtir, voire consolider une réputation sans inclure le Net relève de l’erreur stratégique majeure. Invité par la Fnim pour débattre de cette thématique, Alain Clergeot, à la tête de Chugai Pharma, a d’emblée rappeler ce postulat. Désormais, selon lui, il faut composer avec les nouveaux relais d’opinion que sont les réseaux sociaux. Réseaux sociaux qui englobent aussi bien Facebook que Linked In, les blogs ou encore les communautés qui se créent via Twitter.
Convergence entre médias traditionnels et médias sociaux
« Actuellement, nous assistons à une convergence entre les médias traditionnels, que sont les journaux par exemple, et les médias sociaux », constate Alain Clergeot. Autrement dit : pas question de favoriser les uns au détriment des autres. Il faut « jouer » avec tous. En tout cas, faire en sorte d’y être présent. Que ce soit en tant qu’observateur, ou mieux encore, en tant qu’acteur, de débatteur, voire de leader d’opinion. La communication du XXIe siècle se fait donc en réseau. « Finie l’organisation verticale, insiste Alain Clergeot. L’interactivité est de mise et il faut accepter les compliments comme les critiques portés sur son entreprise par le biais du Net ». Le patron de Chugai Pharma n’hésite pas à comparer cette nouvelle donne à « une révolution culturelle ». En effet, avec plus de 600 millions d’utilisateurs de Facebook –dont 20 millions rien qu’en France-, 700 milliards de vidéos visionnées sur You Tube en 2010 et 95 millions de tweets envoyés chaque jour, nous avons changé d’ère. Nous communiquons autrement. Et ceux qui n’entrent pas dans la danse, risquent fort de rester sur le banc de touche.
Le consommateur est devenu « consommacteur »
« Connaître sa e-réputation, c’est le minimum que l’on puisse faire aujourd’hui », souligne Alain Clergeot. Difficile, il est vrai, de passer à côté d’une « veille réputationnelle » de son entreprise. Ne serait-ce que pour savoir ce qu’elle inspire au grand public, à ses concurrents, aux journalistes, aux politiques… Difficile d’y échapper aussi à l’heure où le consommateur est devenu un « consommacteur ». « Si l’on n’est pas au cœur des échanges orchestrés sur le Net, on risque de se faire dépasser par ses concurrents. Pire : on risque de les laisser prendre la parole sur les produits que l’on fabrique », poursuit Alain Clergeot. Ajoutons à cela que la mise en place d’une « stratégie digitale » permet, en outre, d’anticiper des crises. Ou tout du moins de les expliquer, dédramatiser et rassurer.
Hyperconnexion et accélération d’échanges sont de mise
« Hier, nous avions une communication maîtrisée. Nous étions dans un système que l’on pourrait qualifier de monarchique. Aujourd’hui, chaque marque et chaque entreprise se retrouvent dans un système démocratique, à grand renfort d’hyperconnexion, d’accélération d’échanges et de circulation d’informations ». Tel est le constat établi par Camille Saint-Paul, directrice de l’agence 5ème Rue. Et ce système « démocratique », lié à l’influence du Net sur la vie des entreprises et des marques, se traduit à la fois par des « menaces » et des « opportunités ». Il faut donc apprendre à slalomer, à jongler avec ces inconvénients et ces avantages. « C’est une menace, en effet, si l’on prend conscience qu’à l’heure du Net, une simple vidéo ne peut plus être classée confidentielle », explique Camille Saint-Paul en faisant allusion à la vidéo tournée en interne chez Lilly France, montrant un homme censé être médecin, en train de se faire fouetter par une visiteuse médicale déguisée en panthère, le tout relayé via You Tube… « Nous vivons dans une société défiante vis-à-vis des informations émises par nos institutions. Du coup, les blogs, par exemple, deviennent des sources d’opinion. On les prend en compte dans les débats », poursuit-elle. Face à cette réalité, les entreprises ont donc tout intérêt à être présentes dans ces échanges, cette nouvelle façon de communiquer, dialoguer, prendre le pouls de notre société. Et dans le domaine de la santé publique, cela se traduit par un accompagnement du patient et une écoute, « qui apportent cohérence et visibilité à une marque ».
La triple opportunité des réseaux sociaux
Côté opportunités cette fois, avec les réseaux sociaux « c’est tout un système de relations qui se met en place », souligne Camille Saint-Paul. « C’est un moyen de créer de la valeur. Et ce, aussi bien pour l’entreprise que pour ses interlocuteurs, ses clients, ses partenaires ». La directrice de 5e Rue parle même d’une « triple opportunité » basée sur le service rendu, la confiance retrouvée et la création de la « préférence de marque ». Des pistes pleines de promesses à l’heure où, selon un sondage Ipsos publié en 2010, 71% des Français qui surfent sur le Net recherchent des informations sur la santé. « En matière de stratégie digitale, il faut continuer d’inventer, d’innover, d’expérimenter, conclut Alain Clergeot. Dans ce domaine, nous apprenons encore en marchant. Et notre réflexion doit être transversale, afin de couvrir l’entreprise dans sa globalité, quitte à bousculer parfois la réglementation en vigueur. Car, à terme, les lignes vont bouger, en particulier en ce qui concerne la façon de communiquer sur un médicament vis-à-vis du grand public ».
Anne Eveillard